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BE 2023 Electrification

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L’électrification des usages est un levier essentiel pour que la France et l’Europe atteignent la neutralité carbone en 2050

Les efforts de décarbonation entrepris par la France et l’Union européenne, dans le cadre de l’accord de Paris au niveau mondial, du Pacte Vert au niveau européen, ou encore de la loi Climat1 au niveau national, ont pour objectif l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050. À plus court-terme, l’objectif intermédiaire au niveau européen est de réduire les émissions territoriales nettes de l’Union d’au moins 55 % par rapport à celles de 1990 ; cette ambition est déclinée concrètement, pour l’ensemble des secteurs, par le paquet législatif Fit-for-55, dont la plupart des textes sont aujourd’hui adoptés, et visent à engager, sans attendre, l’Union sur la trajectoire nécessaire pour atteindre les objectifs de 2030 et 2050.

Le système électrique français est aujourd’hui largement décarboné (voir le chapitre Émissions) : ses émissions contribuent peu au bilan carbone global du pays, ce qui représente un atout en vue de l’atteinte des objectifs climatiques. Cependant, l’économie française et les usages énergétiques aujourd’hui non-électriques restent très dépendants des énergies fossiles, et génèrent des émissions significatives : les émissions totales de gaz à effet de serre, toutes origines confondues, sur le territoire français se sont élevées à 415 MtCO2eq en 2021, soit 6,1 tCO2eq/habitant2 3. Le bilan est plus élevé en considérant les émissions liées à la demande intérieure du pays (avec une approche « empreinte carbone »), qui tiennent compte du contenu carbone des produits importés, tout en retranchant le contenu carbone des produits exportés. L’économie française étant, comme celle de la plupart des pays de l’OCDE, fortement tertiarisée, les importations représentent une part importante de l’empreinte carbone. En 2021, celle-ci s’élevait à 575 MtCO2eq, soit 8,4 tCO2eq/habitant. Une relocalisation de certaines productions sur le sol français en même temps que progresse la décarbonation des usages de l’énergie pourrait donc contribuer à la réduction des émissions globales, tout en ayant un effet limité sur l’augmentation des émissions territoriales.

Une transformation nécessaire pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050, commune à tous les scénarios de prospective pour la France ou d’autres pays européens, est l’électrification massive des usages4, c’est-à-dire le transfert vers l’électricité d’une part importante des consommations d’énergie aujourd’hui satisfaites par des combustibles fossiles5. Notamment, l’électrification est un des leviers de décarbonation identifiés dans la Stratégie nationale bas-carbone de la France. L’électrification peut être directe, ou indirecte via notamment le recours à l’électrolyse de l’eau pour la production d’hydrogène.

S’agissant du levier électrification, l’enjeu pour les pays dont les systèmes électriques sont encore relativement carbonés est double : décarboner la production d’électricité tout en augmentant son niveau. Pour la France, compte-tenu du système électrique largement décarboné et des rythmes de transition nécessaires à l’atteinte des objectifs climatiques, la situation de départ est différente mais les enjeux sont similaires : il s’agit d’assoir l’électrification des usages sur un système électrique dont la production doit croître massivement tout restant durablement décarbonée. À court et moyen-terme, c’est-à-dire d’ici 2035, les options de développement du mix de production sont limitées6, et l’augmentation de la production bas-carbone devra passer par l’optimisation du fonctionnement du parc nucléaire actuel, pour maximiser sa production, ainsi que par une accélération du développement des énergies renouvelables (voir chapitre Production) pour accompagner la décarbonation des usages.

Depuis plusieurs années, RTE étudie de manière approfondie les différents leviers qui permettent de diminuer les émissions des différents secteurs économiques qui peuvent bénéficier de l’électrification des usages : les transports7, le chauffage8, l’industrie et la production d’hydrogène9. Notamment, les analyses menées dans le cadre des Futurs énergétiques 2050 ont conclu qu’environ la moitié de la réduction des émissions territoriales nécessaire pour atteindre la neutralité carbone en 2050 pouvait être portée par les transferts d’usages vers l’électricité10.

Dans ce contexte, il est utile de suivre le développement des différents modes d’électrification, dont les effets devraient devenir visibles sur la consommation d’électricité dans les années à venir.

L’analyse détaillée ici se concentre sur trois secteurs qui représentent ensemble 68 % des émissions territoriales de la France et 71 % de la consommation finale d’énergie11 : les transports (31 % des émissions, 30 % de la consommation finale), l’industrie manufacturière (19 % des émissions, 13 % de la consommation finale) et les bâtiments résidentiels et tertiaires (18 % des émissions, 30 % de la consommation finale). L’industrie de l’énergie, elle, représentait en 2021 environ 10 % des émissions territoriales. La moitié de celles-ci est liée à la production d’électricité, qui est déjà largement décarbonée (voir chapitre Émissions), bien que des progrès soient encore possibles ; l’autre moitié provient essentiellement du raffinage de pétrole, du chauffage urbain et de la valorisation énergétique des déchets. Le reste des émissions territoriales de la France provient de l’agriculture (77 MtCO2eq, 18 %) et du traitement des déchets (15 MtCO2eq, 4 %).

conso par secteurs
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émissions par secteur
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Les émissions par habitant de la France sont inférieures à celles de pays comme les Pays-Bas, la Belgique (9,6 tCO2eq/hab. tous deux) ou l’Allemagne (9,1 tCO2eq/hab.), mais sont comparables à celles de pays comme l’Italie (7,1 tCO2eq/hab.) ou l’Espagne (6,1 tCO2eq/hab.). Les émissions territoriales par habitant de l’Union européenne s’élèvent en 2021 à 7,8 tCO2eq/hab (source : European Environment Agency, National emissions reported to the UNFCCC and to the EU Greenhouse Gas Monitoring Mechanism, données 2021). Ces chiffres ne prennent pas en compte les émissions extraterritoriales ni l’aviation internationale (en d’autres termes, il ne s’agit pas d’empreinte carbone, qui, elle, est plus élevée).

4

Pour un résumé des scénarios envisagés par les pouvoirs publics dans une sélection de pays européens, voir RTE, Futurs énergétiques 2050 – chapitre 6 : l’Europe, et Bilan prévisionnel 2023-2035 – chapitre 5 : L’Europe.

5

Le degré d’électrification envisagé peut varier selon les différentes stratégies nationales mais reste élevé pour la plupart des pays européens. D’autres leviers de décarbonation sont le recours à la biomasse (biogaz, bois ou biocarburants), ainsi qu’à d’autres vecteurs de synthèse (hydrogène, e-carburants) produits à partir d’électricité, qui permettent de satisfaire des usages qui ne peuvent l’être par l’électricité directement (il s’agit alors d’électrification indirecte).

10

En considérant le périmètre de l’empreinte carbone, la contribution de l’électrification était évaluée à environ 35 % dans les Futurs énergétiques 2050.

11

Le CITEPA comptabilise les émissions liées à la production d’électricité dans le secteur Industrie de l’énergie. Ici, pour que la comparaison entre part des émissions et part de la consommation finale d’énergie soit valide, c’est donc la consommation finale d’énergie hors électricité de chacun des secteurs qui est considérée.


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Le marché des véhicules électriques est en progression, mais leur part dans le parc français reste faible

Le secteur des transports est de loin le premier émetteur de gaz à effet de serre en France : 31 % des émissions territoriales en 2021. Le transport routier représente à lui seul 29 % des émissions territoriales du pays.

conso TRA
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émissions TRA
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Il existe deux grands axes pour décarboner le secteur des transports : la décarbonation de l’énergie et la réduction des consommations. Dans le premier cas, l’électrification est un des leviers principaux et le plus efficace pour se substituer aux énergies fossiles, mais dans certains usages comme la mobilité lourde ou encore l'aérien, ce vecteur n’est pas nécessairement le plus adapté. La réduction des consommations d’énergie, quant à elle, peut se faire à travers le renouvellement du parc avec des véhicules plus performants mais aussi à travers des mesures de sobriété. Le report modal, par exemple, en fait partie ; il concerne à la fois le transport de passagers, avec la réduction de la part de la voiture individuelle au profit de celle des transports en commun, du vélo, de la marche ou d’autres modes dits « doux », et le transport de marchandises, avec la réduction de la part des poids lourds au profit de celles du transport ferroviaire ou fluvial. La taille et le poids des véhicules, le covoiturage ou encore la réduction des déplacements permettent également de réduire les consommations et donc les émissions. Ce dernier levier est largement dépendant des transformations en ce qui concerne l’aménagement du territoire, l’organisation du travail ou encore les modes de production et de consommation de biens, en privilégiant la consommation de biens produits localement.

Pour chaque pays, la part accordée aux différents leviers dans la définition des objectifs et des trajectoires de décarbonation dépend de nombreux facteurs comme la géographie (humaine et physique) ou les considérations économiques (importance de l’industrie automobile nationale, structure de l’emploi dans le pays, coût des véhicules électriques, revenus et conditions de financement des ménages, etc.), et, en fin de compte, des choix politiques. En France, les politiques publiques sont aujourd’hui orientées majoritairement vers l’électrification1.

S’agissant des véhicules personnels, il existe aujourd’hui des freins à l’électrification à grande échelle, dont le premier est économique : malgré des économies substantielles sur le carburant au cours de toute la durée d’utilisation du véhicule, le coût à l’achat des véhicules électriques personnels reste aujourd’hui élevé par rapport à celui des véhicules thermiques, ce qui réduit la part de la population y ayant accès. Par ailleurs, un marché d’occasion n’a commencé à se développer que depuis relativement peu de temps (ce qui est normal compte tenu de la durée de vie des véhicules). Un second frein concerne la perception des contraintes liées au passage au véhicule électrique : les craintes restent élevées en matière d’autonomie, même si la capacité des batteries s’améliore, et concernent notamment l’adéquation du réseau de bornes de recharge aux usages2.

Pour faciliter l’accès aux véhicules électriques, l’État met en œuvre des subventions à l’achat de plusieurs types3 ; aujourd’hui, le marché des véhicules électriques reste toujours dépendant, à un certain degré, de ces subventions4. Parallèlement, le développement des infrastructures nécessaires à la généralisation de l’usage des véhicules électriques, c’est-à-dire le développement d’un réseau suffisamment dense de points de recharge publics sur les axes routiers principaux, est encouragé et soutenu5.

Les véhicules électriques sont également très exposés aux modifications du contexte géopolitique mondial, avec la montée des protectionnismes, et la remise en cause, par certains acteurs, du libre-échange ; ces modifications reconfigurent les chaînes de valeur et donc les données économiques du problème (voir également la partie Industrie). Un autre point d’attention, plus spécifique et découlant du premier, concerne la compétition pour les ressources, notamment minérales, qui sont nécessaires à la transition énergétique. Un exemple, qui touche particulièrement la décarbonation des transports, est le lithium, qui intervient dans la fabrication des batteries lithium-ion, et dont la production et la transformation sont aujourd’hui concentrées dans quelques pays6. Pour l’Europe, la décarbonation du secteur nécessitera de trouver le bon équilibre entre l’amélioration de la compétitivité économique des véhicules électriques pour favoriser leur déploiement à grande échelle, et la sécurisation des chaînes d’approvisionnement qui aujourd’hui impliquent des acteurs étrangers ayant des intérêts différents (la Chine en premier lieu, mais également, avec des enjeux différents, les États-Unis).

En 2023, la part de marché des véhicules tout-électriques en France a nettement augmenté, et dépasse celles en Allemagne et au Royaume-Uni

pdm VE
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En 2023, la part de marché des véhicules tout-électriques7 en France a nettement progressé. En 2022, elle était de moins de 15 % ; en 2023, elle a atteint 19 %, c’est-à-dire que presque un véhicule sur cinq vendu en France en 2023 était 100 % électrique. Pour la première fois depuis 2019, lorsque les ventes de véhicules électriques étaient encore marginales, cette part a dépassé celle constatée en Allemagne (18 %), où la réforme des subventions à l’achat a conduit à une stagnation de la part de marché, et au Royaume-Uni (17 %), où la part de marché n'a pas non plus progressé en 2023. En Espagne, la part de marché des véhicules électriques demeure bien plus faible8 : en 2023, elle a été autour de 5 %. Le nombre de véhicules tout-électriques roulant en France a dépassé en 2023 le million. Si la part de marché de ces véhicules dans le neuf est un indicateur important, et sa croissance encourageante, il convient de rappeler que le renouvellement du parc automobile, qui est constitué d’environ 40 millions de véhicules en circulation dans le pays, est caractérisé par une certaine inertie9. Ainsi, la part des véhicules électriques sur le total en France est d’environ 2,5 % (les proportions sont similaires en Allemagne et au Royaume-Uni).

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Malgré une place dans le parc encore assez marginale, les véhicules électriques légers ont déjà permis d’éviter l’émission de 4 MtCO2eq depuis 2013, dont plus d’un quart (un million de tonnes d'équivalent-CO2) sur la seule année 2023. Ce bilan, reposant sur l’hypothèse de batteries fabriquées en Asie, pourrait être encore amélioré si celle-ci étaient fabriquées en France (voir Industrie).

infra VE
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En parallèle, le développement des infrastructures de recharge s’est poursuivi en 2023. Le nombre de véhicules par borne publique de recharge installée en France, qui permet d’évaluer l’adéquation du réseau aux besoins, s’est maintenu en dessous du plafond indicatif de 10 véhicules par borne, recommandé par la Commission européenne. Le règlement AFIR, adopté en 2023 dans le cadre du paquet législatif Fit-for-55, définit également un critère de densité spatiale pour les bornes de recharge publiques, d’au moins une borne tous les 60 kilomètres sur le réseau routier européen principal10.

1

Voir par exemple le projet de Stratégie française énergie-climat, mis en consultation publique en novembre 2023, spécifiquement la partie n°4  « Les 5 objectifs de la Programmation pluriannuelle de l’énergie », et les orientations présentées dans l’objectif 1 « Baisser nos consommations d’énergie ».

4

Le tassement de la croissance de la part de marché des véhicules électriques en Allemagne (voir ici), immédiatement consécutive à la réforme, fin 2023, des aides à l’achat de véhicules électriques particuliers, tend à appuyer cette affirmation.

5

C’est l’objet, entre autres, du règlement de l’Union européenne sur les infrastructures pour les carburants alternatifs, dit « AFIR », adopté en cours d’année 2023 dans le cadre du paquet Fit-for-55.  Voir Conseil de l'Union européenne, Communiqué de presse. Infrastructure pour carburants alternatifs: le Conseil adopte une nouvelle loi pour accroître le nombre de stations de recharge et de ravitaillement en Europe, 2023.

7

Par la suite « véhicule électrique » ou « voiture électrique » seront utilisés par simplicité pour indiquer des véhicules ou voitures 100 % électriques (véhicules hydrides rechargeables exclus, donc).

8

Des possibles explications résident dans le développement des infrastructures de recharge, jugé insuffisant par la filière automobile (Asociación Española de Fabricantes de Automóviles y Camiones, Informe Anual de Vehículo Electrificado, 2023) et dans l’accessibilité économique (le PIB/habitant est en général corrélé à la part de marché des véhicules électriques).

9

La durée de vie d’une voiture est aujourd’hui d’environ 15 ans en France.

10

Tel que défini formellement dans le règlement sur les réseaux trans-européens de transport (RTE-T, ou TEN-T, en anglais, analogue du règlement sur les réseaux trans-européens d’énergie, le RTE-E ou TEN-E). Voir European Commission, Trans-European Transport Network (TEN-T).


Données mises à jour le 6 février 2024

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Décarbonation des bâtiments : une dynamique à amplifier pour atteindre les objectifs publics

conso BAT
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emissions BAT
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L’amélioration de la performance environnementale des bâtiments résidentiels repose essentiellement sur deux leviers : le passage à un mode de chauffage bas-carbone (électricité incluse), et la rénovation thermique1. La mise en œuvre conjointe de ces deux leviers permet d’une part de consommer moins d’énergie et d’autre part d’utiliser de l’énergie bas-carbone pour chauffer un même logement.

En 2022, le chauffage électrique, essentiellement représenté par les pompes à chaleur, est redevenu majoritaire dans le résidentiel neuf

En 2022, pour la première fois depuis 2010, plus de systèmes de chauffage électriques ont été installés dans le parc de bâtiments neufs que de systèmes non-électriques2. Au cours de la décennie 2010, l’augmentation des ventes de pompes à chaleur avait été plus lente que la diminution des ventes de radiateurs électriques : la part de marché des systèmes électriques avait donc d’abord baissé pour atteindre moins d’un tiers en 2014. La progression des ventes de pompes à chaleur a ensuite permis aux systèmes électriques de redevenir majoritaires dans le neuf en 2022 pour la première fois depuis 2010.

pdm chauffage neuf
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À la différence de 2010, près de 85 % des systèmes de chauffage électrique installés en 2022 étaient des pompes à chaleur, et 15% des radiateurs ; en 2010, les proportions étaient inversées. Tant que les températures ne descendent pas à des niveaux très faibles (proches de zéro ou inférieurs), les pompes à chaleur sont beaucoup plus efficaces d’un point de vue énergétique que les simples radiateurs, ce qui constitue un atout pour la diminution des besoins énergétiques totaux (toutes énergies confondues) dans le cas d’un remplacement d’un système au gaz ou au fioul par une pompe à chaleur3.

En 2023, le rythme de rénovations thermiques des bâtiments résidentiels a baissé pour la deuxième année consécutive après le maximum de 2021

L’autre levier, fondamental et complémentaire à l’électrification en vue de la décarbonation de la consommation d’énergie pour le chauffage, est l’isolation thermique des bâtiments.

rénovations thermiques
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En France, l’aide à la rénovation thermique du parc de logements se matérialise essentiellement par un programme d’aides financières pour les ménages mis en œuvre par l’Agence nationale de l’habitat (Anah). Le nombre annuel de rénovations ainsi que le montant des aides accordées permet de suivre le déploiement du programme. Après un retard accumulé dans les premières années du programme, la dynamique s’est rapidement accélérée à partir de 2021. Sur les trois dernières années, en moyenne, près de 600 000 rénovations par an ont été réalisées (avec toutefois une baisse deux années de suite en 2022 et en 2023). Ce rythme devra être maintenu sur la période 2024-2030 pour atteindre l’objectif de 370 000 rénovations par an en moyenne sur la période 2015-2030 fixé dans la PPE 2019–20284 5.

Le nombre total de rénovations menées dans le cadre du programme public de rénovation thermique des bâtiments masque une diversité des types et d’exhaustivités dans les travaux, qui ont des effets différents en ce qui concerne les économies d’énergie et les gains d’efficacité énergétique, et donc in fine les émissions évitées. Les rénovations dites « d’ampleur » désignent celles qui sont le plus complètes, et ont le plus d’effet. En 2023, celles-ci sont en légère hausse par rapport à 2022, en nombre absolu comme en proportion : 72 000 rénovations complètes en 2023, représentant 13 % de toutes les rénovations énergétiques sur l’année, contre 66 000 en 2022 (10 % du total).

Enfin, s’agissant du secteur des bâtiments, il convient de mentionner un troisième levier important : la sobriété (c’est-à-dire, essentiellement, le fait de baisser la température de consigne pour le chauffage), qui permet de consommer moins.

1

Selon une analyse réalisée par RTE dans le cadre du Bilan prévisionnel 2023, le passage de modes de chauffage au gaz ou au fioul vers des modes de chauffage bas-carbone, c’est-à-dire essentiellement électrique, représente environ 80 % du gisement de réduction des émissions de gaz à effet de serre du secteur à l’horizon 2035.

2

Bati-étude, L’énergie du chauffage, 2023.

3

Dans certaines situations très particulières l’installation de pompe à chaleur n’est simplement techniquement pas possible.

4

Le gouvernement a récemment fixé, hors PPE, un objectif indicatif de 700 000 rénovations pour 2024.

5

Au sens large, le terme « rénovation thermique » désigne les travaux d’isolation mais peut aussi inclure le remplacement du système de chauffage. Les chiffres de l’Agence nationale de l’habitat, présentés ici, ne distinguent pas les deux.


Données mises à jour le 6 février 2024

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L’électrification de l’industrie, un levier indispensable pour accompagner la réindustrialisation de la France

Malgré une baisse relative de son poids dans les émissions territoriales de la France au cours des dernières décennies, l’industrie représente toujours une part importante des de celles-ci : aujourd’hui, le secteur industriel est le deuxième secteur le plus émetteur de gaz à effet de serre en France et il représente environ un cinquième des émissions territoriales.

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Les émissions industrielles sont principalement liées à l’activité de quelques secteurs, qui sont aussi, par ailleurs, des grands consommateurs d’énergie. En particulier, les secteurs de la chimie, des minéraux et de la métallurgie représentent chacun environ 5 % des émissions territoriales françaises : leur décarbonation est un enjeu important pour la France. Dans le cadre du plan « France 2030 », des feuilles de route ont été élaborées pour chaque filière détaillant l’ensemble des mesures envisagées par les industriels pour réduire leurs émissions.

Les complexes industriels correspondant à ces secteurs sont concentrés dans quelques zones situées dans les Hauts-de-France, en Normandie, dans la vallée du Rhône et dans les Bouches-du-Rhône. Ainsi, les émissions sont avant tout concentrées sur une cinquantaine de sites industriels, qui produisent à eux-seuls 55 % des émissions de toute l’industrie. Dans le cadre de la planification écologique, le gouvernement a mis en place des « contrats de transition écologique »1 avec les 50 sites industriels les plus émetteurs, afin de suivre leurs engagements de décarbonation.

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La décarbonation de l’industrie présente un enjeu supplémentaire : celui de s’assurer que la croissance de la consommation énergétique industrielle qu’induira l’implantation sur le territoire des futurs sites industriels dans le cadre de la réindustrialisation du pays envisagée par les pouvoirs publics2 soit satisfaite par des énergies bas-carbone. Cette ambition est portée entre autres, au niveau national, par la Loi sur l’industrie verte3 et, au niveau de l’Union européenne, par le Net-Zero Industry Act4, ainsi que par des plans de financement : France Relance (en réaction à la crise sanitaire) et France 2030, dotés d’une enveloppe de 35 et 54 milliards d’euros respectivement. L’objectif de ces outils réglementaires et législatifs est à la fois de relocaliser une partie de la production industrielle mais aussi de développer de nouvelles filières, dont la production de batterie et de l’hydrogène décarboné sont deux exemples.

L’électrification de l’industrie et la réindustrialisation du pays marqueront une rupture nette de la tendance des 30 dernières années

La période entre 1970 et 1990 a été caractérisée, en France, par une augmentation de la part de l’électricité dans la consommation finale d’énergie du secteur industriel. Cette augmentation n’est pas assimilable à une électrification au sens où on l’entend aujourd’hui dans le cadre de la transition énergétique, c’est-à-dire à un transfert d’usages des énergies fossiles vers l’électricité. Il s’agit avant tout d’une conséquence de l’évolution de la composition du tissu industriel français, avec notamment la délocalisation à l’étranger de certaines production très énergivores et polluantes et l’augmentation, en conséquence, du poids relatif des industries où la part de l’électricité dans la consommation était plus élevée.

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Par la suite, entre les années 1990 et 2005, la part de l’électricité dans la consommation finale d’énergie dans l’industrie a d’abord légèrement augmenté, puis est restée relativement stable, avant une nouvelle augmentation en 2022. La relative stagnation depuis les années 2000 est le résultat de plusieurs effets opposés : d’une part une légère progression de l’électrification, d’autre part une poursuite de l’évolution de la structure du tissu industriel français.

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La part de l’électricité dans la consommation finale d’énergie de l’industrie a atteint en 2022 son plus haut niveau historique. Elle est redevenue, pour la première fois depuis 2009 où elle devançait le gaz de très peu, l’énergie la plus consommée par l’industrie française, devant le gaz et bien devant le pétrole, les énergies renouvelables, les déchets et le charbon. Cette première place est le résultat de la contraction plus importante de la consommation de gaz naturel du secteur industriel, par rapport à celle de l’électricité, entre 2021 et 2022. En effet, les prix du gaz ont connu en 2022 une augmentation plus significative encore que les prix de l’électricité.

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À moyen terme, lorsque cela est possible et pertinent, les procédés utilisant des combustibles fossiles devront être remplacés par des procédés utilisant de l’électricité dans l’objectif de diminuer les émissions de l’industrie. À titre d’exemple, l’entreprise ArcelorMittal a annoncé vouloir remplacer les hauts-fourneaux de ses usines sidérurgiques de Dunkerque et de Fos-Sur-Mer, qui fonctionnent au charbon, par des fours électriques5. Il convient de souligner que, au contraire des secteurs du bâtiment et du transport, où l’enjeu réside en le passage à l’échelle et l’adoption massive de technologies déjà utilisées, l’électrification de l’industrie présente des défis techniques et économiques spécifiques à chaque procédé, voire à chaque site.

Grâce à son mix électrique déjà largement décarboné, la France possède actuellement un avantage comparatif (économique et climatique) en matière de production d’électricité, ce qui représente une fenêtre d’opportunité en matière d’investissement dans l’appareil industriel au cours des prochaines années. Ainsi, l’électrification directe des procédés industriels qui peuvent l’être peut entraîner une diminution directe des émissions de certaines de ces industries. Pour certains procédés qui ne peuvent être électrifiés, le recours à de l’hydrogène bas-carbone produit par électrolyse est l’option privilégiée, ce qui se traduira tout de même par une augmentation des consommations d’électricité (il s'agit d'une électrification indirecte), avec des enjeux concernant la flexibilité de leur consommation (voir le chapitre Flexibilité).

Focus : Les usines de batteries, une incarnation de l’ambition française et européenne de réindustrialisation

Le plan France 2030 comprend une stratégie nationale « Batteries », dont le but est d’accompagner le développement d’une filière française de production de batteries. Selon cette trajectoire, la France devrait disposer à cette échéance d’une capacité de production de 120 GWh/an de batteries. Les projets actuellement existants, tous situés dans les Hauts-de-France, représentent déjà, à terme, une capacité totale de 107 GWh/an. Les premières batteries produites en France devraient sortir d’usine en 2024.
Le soutien à cette filière, contribue au développement de la mobilité électrique et à soutenir l’industrie du transport, puisque la production de batteries en est un composant essentiel, et concentre une part importante de la valeur ajoutée de la production d’un véhicule. Des acteurs traditionnels de l’automobile sont d’ailleurs impliqués dans ces projets, parfois directement comme dans le cas de l’usine ACC (Automotive Cell Company, une co-entreprise de Stellantis, Saft et Mercedes), et parfois indirectement comme dans le cas de l’usine Envision AESC, entreprise sino-japonaise, qui fournira les usines de Renault. 
carto batteries

L’électrification indirecte de l’industrie reposera sur l’hydrogène bas-carbone, un vecteur dont le passage à l’échelle présente des enjeux significatifs

La production d’hydrogène bas-carbone est indispensable pour permettre la décarbonation des secteurs industriels dont l’électrification complète est impossible ou n'est pas pertinente6, ce qui devrait entrainer une hausse considérable de la demande pour ce vecteur énergétique. L’hydrogène est aujourd’hui produit essentiellement par vaporeformage du méthane, ce qui entraîne des émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. L’utilisation de procédés alternatifs, comme l’électrolyse de l’eau à partir d’électricité bas-carbone, est donc nécessaire pour atteindre les objectifs de décarbonation.

Cependant, la capacité de la France et de l’Europe à développer la production d’hydrogène bas-carbone à une grande échelle, aux rythmes nécessaires, est l’objet d’incertitudes fortes, tant du point de vue économique que de la stratégie industrielle, notamment, pour s’assurer de la compétitivité économique de cette filière par rapport aux autres sources d’approvisionnements (autres procédés plus émetteurs, importations et gisements naturels).

Afin de structurer cette filière, dans le cadre de la stratégie française sur l’hydrogène publiée en 20207, le gouvernement a annoncé un objectif d’installation d’électrolyseurs pour une capacité à la hauteur de 6,5 GW à l’horizon 2030. Pour cela, une enveloppe de 9 Md€ est prévue pour soutenir les investissements dans la filière sur la période 2020-2030. Aujourd’hui, selon les premières orientations soumises à consultation en novembre 2023 dans le cadre de la préparation de la prochaine Stratégie française énergie-climat, 300 MW ont déjà bénéficié d'un soutien depuis 2020, et de 2,5 GW de capacités supplémentaires devraient être mises en service dans les prochaines années.

La production d’hydrogène représente aussi un enjeu majeur pour le système électrique. Selon les estimations élaborées par RTE dans le Bilan prévisionnel 2023, la consommation d’électricité des électrolyseurs pour la production d’hydrogène en France pourrait atteindre 65 TWh dans le scénario de référence8. Plus généralement, l’électrification de l’industrie nécessitera également d’adapter les infrastructures de transport d’électricité afin qu’elles puissent soutenir la croissance de la consommation des sites industriels, et ce à un rythme très élevé9.

6

Essentiellement pour des raisons techniques : certains procédés industriels nécessitent, par exemple, des températures très élevées, qui ne peuvent pas être atteintes à l’aide des systèmes fonctionnant à l’électricité. C’est le cas de la production d’ammoniac, par exemple.

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Données mises à jour le 6 février 2024