Des besoins en augmentation sous l’effet du développement des énergies renouvelables
Le fonctionnement du système électrique nécessite un équilibre à chaque instant entre production et consommation d’électricité. Le maintien de cet équilibre s’est principalement reposé, jusqu’à présent, sur la flexibilité offerte par les moyens de production pilotables (notamment les unités de production nucléaires, thermiques fossiles et hydrauliques de lac). D’autres leviers comme des adaptations de la consommation ou le recours au stockage contribuent également à assurer l’équilibre entre offre et demande, mais dans une moindre mesure par rapport à la flexibilité de la production. Par ailleurs, les échanges avec les pays voisins, qui permettent d’optimiser le fonctionnement du système électrique à l’échelle européenne en permettant une mutualisation des moyens, constituent également un élément important pour l’équilibrage du système électrique en temps réel.
L’adaptation du profil de consommation au profil de production, ou « flexibilité de la demande », est donc un des leviers existants pour garantir l’équilibre offre-demande, qui devient de plus en plus nécessaire avec la croissance des volumes d’électricité renouvelable fatale (éolienne et solaire) produits. Cependant, il ne s’agit pas d’un concept nouveau : notamment, la diffusion du tarif « heures creuses » à partir des années 1960 a permis de déplacer une partie de la consommation des heures diurnes, où elle est plus élevée, vers les heures nocturnes (où elle est généralement faible) grâce à un tarif d'électricité plus attractif pour le consommateur. Ce lissage de la demande est très adapté au mix historique français, reposant principalement sur le nucléaire, car d’une part il permet de solliciter moins de moyens de production carbonés, plus coûteux, pendant la journée, d’autre part de réduire la modulation à la baisse du nucléaire pendant la nuit. C’est notamment pour offrir un débouché à l’abondante production nucléaire nocturne que s’est développé l’asservissement des ballons d’eau chaude au signal « heures creuses » au cours des années 1980.
Aujourd’hui, le développement de la production éolienne et solaire entraîne donc une augmentation des besoins de flexibilité, qui peuvent concerner des adaptations « structurelles » du profil de consommation (par exemple pour profiter de l’abondance de production solaire en début d’après-midi), de manière analogue à l’adaptation qui a accompagné le développement du nucléaire. Des adaptations plus ponctuelles existent, ainsi que d’autres leviers comme le développement de solutions de stockage, les batteries pour le très court terme, et le power-to-gas pour le stockage inter-saisonnier.
Il existe en effet différents types de flexibilités permettant d’adresser des besoins variés. Il est possible de les classifier de manière séquencée dans le temps, avec un volume d’énergie déplacée qui décroit à l’approche du temps réel :
- Les flexibilités structurelles et régulières représentent l’essentiel des besoins de flexibilités, qui sont largement prévisibles longtemps à l’avance (au regard de la forme naturelle de la courbe de charge, de la production solaire en journée, ...). L’enjeu réside dans le positionnement des arrêts de moyens de production pilotable par rapports aux périodes de plus faible consommation (en été, le week-end) et dans la modification des courbes de charge de manière structurelle pour positionner la consommation lorsque l’électricité bas-carbone est abondante.
- Les flexibilités dynamiques adressent des besoins qui sont prévisibles avec une avance qui va de quelques jours jusqu’à quelques heures (infra-journalier), notamment en réaction aux incertitudes liées aux conditions météorologiques (production éolienne, thermo-sensibilité de la consommation) ;
- Les flexibilités d’équilibrage viennent remédier aux aléas (pannes, incidents) ou aux incertitudes liées à des changements soudains des conditions météorologiques qui représentent un enjeu pour la gestion de l’équilibre entre offre et demande en temps réel ; leur besoin total ne représente pas plus de quelques GW, et n’augmentera que marginalement malgré l’évolution du mix de production ;
- Les flexibilités de sauvegarde concernent les besoins requis pour faire face aux situations exceptionnelles affectant l’équilibre offre-demande. La mobilisation de ce type de flexibilité repose actuellement principalement sur le signalement par le dispositif Ecowatt des journées et heures les plus à risque.
Les trois premiers types de flexibilités sont mobilisés tous les jours et peuvent être valorisés dans le cadre du fonctionnement des marchés de gros et d’équilibrage, alors que les flexibilités de sauvegarde répondent à des besoins exceptionnels et ponctuels.
