Électrification des transports
Dans tous les scénarios de neutralité carbone à l’horizon 2050, français ou européens, la décarbonation de l’économie passe par un développement significatif de l’électrification des usages de l’énergie, en particulier en ce qui concerne les secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre. L’électrification peut être directe, ou indirecte via notamment le recours à l’électrolyse pour la production de combustibles décarbonés. Les implications pour le système électrique seront importantes, que ce soit du point de vue du volume de consommation, appelé à augmenter selon les différentes trajectoires analysées par RTE1, ou pour le pilotage des appels de puissance. RTE a publié entre 2019 et 2020 trois rapports approfondis qui détaillent les enjeux de l’électrification des usages pour le système électrique, à l’horizon 2035 : sur la mobilité électrique2, la production d’hydrogène3 et le chauffage dans les bâtiments4.
Les transports représentent aujourd’hui 30 % des émissions annuelles de gaz à effet de serre en France, et le transport routier représente à lui seul 29 %. C’est l’un des seuls secteurs dont les émissions ont augmenté depuis 1990 (+10 %)5. Pour cette raison, l’électrification du parc de véhicules ainsi que le développement de la production de combustibles décarbonés (dont l’hydrogène produit par électrolyse) représentent un des grands enjeux de la décarbonation de l’économie, qui est susceptible d’entraîner une hausse significative de la consommation d’électricité6.
Le développement massif de la mobilité électrique dans les années à venir semble être une certitude, avec une dynamique positive déjà installée depuis plusieurs années. En 2022, l’électrification du parc de véhicules s’est poursuivie en France de manière favorable, grâce notamment au maintien des aides à l’achat (bonus écologique, prime à la conversion) et au développement de l’offre. Les véhicules tout électriques et hybrides rechargeables ont représenté 18,5 % du marché en 2022 (contre 15 % en 2021), avec près de 346 000 immatriculations sur environ 1,9 millions de véhicules légers (particuliers et utilitaires légers) mis en circulation sur l’année7. Le nombre de nouvelles immatriculations en 2022 marque ainsi une progression de +10 % par rapport à 2021 et a été multiplié par 5 par rapport à 2019. Les véhicules particuliers 100% électriques ont, eux, représenté une part de marché de 14 %, soit 207 000 ventes en 2022 sur un total de 1,5 millions.
La mobilité électrique se développe également chez nos voisins européens, avec une dynamique comparable. La part de marché des véhicules tout-électriques est supérieure en Allemagne par rapport à la France, et dépasse les 30 % en 2022, et similaire au Royaume-Uni (légèrement au-dessus de 20 %). La part de marché en Espagne est, quant à elle, largement plus faible, et ne dépasse toujours pas les 5 %.
Le développement de la mobilité électrique en France a déjà permis d’éviter un volume d’émissions non négligeable, compte tenu de la part encore faible des véhicules électriques dans le parc roulant (moins de 1 %). Environ 2,8 MtCO2éq ont été évitées depuis 2013 grâce à l’électrification des véhicules légers (tout-électriques), dont la moitié sur les deux dernières années. Ce volume est estimé en prenant en compte toutes les émissions sur le cycle de vie des véhicules, notamment les émissions liées à la fabrication de la batterie, et en les comparant aux émissions sur le cycle de vie d’un véhicule thermique (essence) équivalent.
Des leviers possibles d’amélioration du bilan environnemental
Les valeurs affichées ci-dessus ont été estimées sur la base d’une fabrication des batteries en Asie. Un des leviers d’amélioration possibles du bilan sur le cycle de vie des véhicules électriques, du point de vue des émissions de gaz à effet de serre, pourrait être la fabrication des batteries dans des pays où le mix énergétique, et le mix électrique en particulier, est moins carboné. Une estimation considérant par exemple une fabrication en France porterait le total d’émissions évitées depuis 2013 à 3,5 MtCO2éq8, soit une augmentation de +25 %.
Développement des infrastructures de recharge
Un déploiement important de bornes de recharge publiques doit accompagner le développement de la mobilité électrique pour en favoriser l’adoption par les usagers. La Commission européenne recommandait en 2014 un ratio indicatif d’au moins 1 borne pour 10 véhicules9. Cela permet d’estimer l’adéquation entre le développement des véhicules électriques et celui des infrastructures nécessaires pour les accueillir10. Le graphique suivant montre l’évolution du nombre cumulé de bornes de recharge publiques sur le territoire français ces dernières années, ainsi que le ratio véhicules par borne :
Dans l’ensemble, le développement des infrastructures publiques de recharge suit celui des véhicules électriques. En 2022, une borne de recharge publique était disponible pour 8 véhicules électriques en circulation, ratio qui dépasse l’objectif de la Commission11. En parallèle de la progression du nombre de bornes publiques, il sera également nécessaire que le réseau privé de bornes de recharge, notamment dans les entreprises et les logements collectifs, se développe de manière adéquate.
1 Voir « Futurs énergétiques 2050 », chapitre 3, « La consommation », 2022, RTE.
2 « Enjeux du développement de l’électromobilité pour le système électrique », 2019, RTE.
3 « La transition vers un hydrogène bas carbone », 2020, RTE.
4 « Réduction des émissions de CO2, impact sur le système électrique : quelle contribution du chauffage dans les bâtiments à l’horizon 2035 », 2020, RTE, ADEME.
5 Citepa, rapport Secten 2022.
6 Voir « Futurs énergétiques 2050 », chapitre 3, « La consommation », 2022, RTE.
7 Données AVERE.
8 Les données concernant les émissions sur le cycle de vie sont celles considérées dans l’analyse environnementale des Futurs énergétiques 2050, pour 2021 et les années antérieures. Les données concernant les immatriculations sont celles du Ministère de la Transition Écologique et de l’AVERE pour les immatriculations mois par mois en 2022.
9 Directive (UE) n° 2014/94 sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs.
10 Un autre paramètre important mais plus difficile à mesurer est la répartition géographique de ces bornes. Dans le cadre du projet de règlement sur les carburants alternatifs, qui fait partie du paquet Fit-for-55, un indicateur d’une borne tous les 60 km est actuellement discuté.
11 A l’exception de 2020, où l’on peut supposer que les installations ont pu être freinées temporairement par la crise sanitaire.
Données mises à jour en février 2023